Sommaire

Écritures
De la ludique nature, Rómulo Bustos Aguirre, traduit de l'espagnol (Colombie) par Yasmina Tippenhauer
Un marin, Leonid Dobytchine, traduit du russe par Annick Morard
À R., que je n'envoie pas, Laurent Herrou
Gauge, Alban Lefranc
Hannah 18 euros, Gilles Sebhan
Jouer à la limite du hors-jeu, R. J. Robillard, traduit de l'anglais (États-Unis) par Sylvain Thévoz
Des âmes, des herbes, Dubravko Pušek, traduit de l'italien par Pierre Lepori

Entretiens
Dennis Cooper, La vérité dans le bordel, par Antoine Bal
Marcela Iacub: Lois de la chair, par Pierre Lepori

Images
Leni Riefenstahl: My Ethiopia, Diego Sanchez

Réflexions
Corporalité sportive et nazisme, Gianni Haver
Gertrude Stein et Alice Toklas, Edward Burns, traduit de l'anglais (États-Unis) par Guy Poitry
«Il va venir, la Madame?», Fernando Carvajal Sánchez

Lectures
Rétro, Olivier Bouillère, par Fabrice Huggler
Provincetown playhouse, Normand Chaurette, par Guy Poitry
Le Dossier 51, Michel Deville par Pierre Lepori
Où on va papa? Jean-Louis Fournier par Gonzague Bochud
La comédie de Dieu, João César Monteiro par Elena Jurissevich
Domodossola. Le suicide de Jean Genet, Gilles Sebhan par Sylvain Thévoz
Gemma Bovery, Posy Simmonds par Jelena Ristic

HOMO01-38


Au cinquième numéro d'Hétérographe, force est de constater que dans les textes d’auteurs connus et inconnus qui affluent vers le comité de rédaction, le thème central, presque obsessionnel, est la sexualité, le sexe sous ses formes parfois crues, disparates, en bordure des solitudes les plus contemporaines ou des aventures les plus hasardeuses: dans cette livraison une poupée gonflable prend la parole (Gilles Sebhan), tandis qu’un père de famille fruste vit son amour télé-fantasmé pour une star du porno (Alban Lefranc). Certes, nous arpentons toujours des chemins moins explicites (comme dans les deux poèmes qui ouvrent et clôturent le cahier de création) et faisons encore entendre les voix de la marge. Mais le sexe est bien là, comme une évidence, dans nos sommaires. Nous ne souhaitons ni une occultation, ni une surdétermination. Loin de nous scandaliser, cela nous interroge: nous imaginons une revue qui s'éloigne des sentiers battus. Mais n'est-ce pas un cliché de retrouver à chaque coinde rue la sexualité? Est-ce peut-être la présence du mot «homo» (ou pas!) dans le sous-titre qui renvoie encore et toujours à une démarcation sexualisée des genres et des identités héritée du XIXe siècle, et qui finiraitpar rabattre toujours sur cette catégorie des échappées diverses? Dans l'entretien qu’elle nous accorde, la juriste Marcela Iacub nous rappelle qu'historiquement les interdictions qui frappent le corps et le désir (comme celle qui menace la pornographie dans le pays le plus «libre» du monde, les États-Unis) travaillent au cœur même de l'articulation entre «ce qu’on peut dire», «ce qu'on peut montrer» et «ce qu'on peut faire». La bio-politique et les «instances de productions discursives» (Foucault), qui façonnent nos agissements, nos valeurs et nos regrets frappent le plus fort là où le corps s'expose, dans les traversées de la barrière — socialement construite — entre l'intime et le public, entre le tu et le revendiqué.